Imaginez un instant : vous venez (ou êtes en train) de vendre un petit bien immobilier pour en acquérir un autre, plus confortable, mieux situé, ou simplement plus paisible pour savourer une retraite bien méritée. Au beau milieu des démarches, surgit un mot parfois opaque, souvent redouté : l’assurance emprunteur. Et, plus précisément encore, la question de la maladie. Voilà un domaine où les lignes sont en train de bouger, et où il est tout à fait possible de faire valoir ses droits — pour autant qu’on les connaisse.
Je vous propose aujourd’hui une promenade documentée au cœur de l’assurance crédit immobilier lorsqu’une maladie — passée, présente, ou parfois redoutée — entre dans l’équation. Avec, comme toujours, ce mélange de sérénité et de lucidité qui fait notre charme, bien à l’abri des angoisses mal informées.
Pourquoi une assurance est-elle exigée pour un prêt immobilier ?
En matière de crédit, la banque œuvre avec prudence. Elle souhaite garantir le remboursement du prêt, même si l’emprunteur venait à décéder, à cesser son activité professionnelle à cause d’un accident ou d’une maladie, ou encore à subir une perte de revenus. C’est là qu’intervient l’assurance emprunteur – une exigence dans la très grande majorité des cas.
Cette assurance agit donc en filet de sécurité, à la fois pour vous et pour la banque. Mais lorsque l’on présente un “risque aggravé de santé”, les choses se compliquent. Pourtant, des dispositifs existent pour protéger les personnes malades ou ayant été malades. Il est bien légitime, passé un certain âge, d’avoir un dossier médical un peu plus épais que celui d’un adolescent en pleine croissance !
Maladie et prêt immobilier : une situation pas si rare
À partir de 60 ans, qui peut encore se targuer d’un dossier médical immaculé ? Petits accidents de parcours, maladies chroniques stabilisées, traitements réguliers… Ces réalités du quotidien doivent pourtant être déclarées lors de la souscription d’une assurance de prêt – ce qui, naturellement, peut poser problème.
Durant ma carrière, j’ai vu nombre de collègues professeurs, souvent pleins d’enthousiasme face à l’idée d’un projet immobilier ensoleillé au sortir de l’Éducation Nationale, se heurter aux arcanes des assurances. Le simple fait d’avoir eu, dans les dix dernières années, un traitement contre une affection – dans certains cas bénigne – pouvait entraîner refus ou surprime. Le sentiment d’injustice était souvent palpable.
Heureusement, les choses ont évolué.
La convention AERAS : un filet de sécurité pour les emprunteurs malades
Entrons un peu dans le détail. Si l’on vous a déjà parlé de la convention AERAS (s’Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé), sachez qu’elle peut être un atout précieux. Signée entre les assureurs, les banques et les associations de malades, elle permet aux personnes présentant un risque de santé élevé d’accéder plus équitablement à l’assurance emprunteur.
Concrètement, voici ce qu’elle prévoit :
- Un parcours en trois niveaux d’analyse, pour examiner le risque de façon plus nuancée.
- Des plafonds adaptés : pour les prêts immobiliers inférieurs à 420 000 € et dont l’échéance intervient avant les 71 ans de l’emprunteur, AERAS s’applique.
- La mise en place de garanties spécifiques, parfois allégées, lorsque les garanties classiques sont inaccessibles.
- L’obligation pour l’assureur de motiver une décision de refus et de communiquer clairement sur les voies de réexamen.
Mais surtout, et c’est une avancée majeure : certaines pathologies sont aujourd’hui intégrées à une grille de référence (actualisée régulièrement) qui favorise l’assurabilité post-maladie. Par exemple, certaines formes de cancers ou d’hépatites, une fois guéries depuis plusieurs années, n’entraînent plus de surprime ni d’exclusion.
La fin du questionnaire médical dans certains cas
Aviez-vous entendu parler du changement apporté par la loi Lemoine (2022) ? Là encore, une révolution (douce, mais bienvenue) : il n’est plus obligatoire de remplir un questionnaire médical si le montant emprunté par personne ne dépasse pas 200 000 € et que le prêt sera remboursé avant les 60 ans de l’emprunteur. Alors certes, pour les seniors, cette disposition ne s’applique pas toujours. Mais si vous empruntez à deux avec votre conjoint, cette limite de 200 000 € par tête (soit 400 000 € à deux) peut rendre l’opération plus accessible, surtout pour l’achat d’une résidence secondaire ou d’un pied-à-terre plus modeste.
Cela signifie que dans bien des cas, le poids du passé médical peut être levé. Le droit à l’oubli est un autre dispositif à souligner : il limite le temps pendant lequel un ancien malade doit déclarer sa pathologie à l’assureur.
Quelles garanties choisir quand on a (eu) des soucis de santé ?
Parfois, il faut savoir faire preuve de souplesse plutôt que de tenter d’obtenir l’assurance parfaite, complète et universelle. Quand certains risques sont jugés trop élevés, il peut être judicieux de concentrer les garanties sur ce qui est le plus essentiel, tout en acceptant certaines exclusions.
Dès lors, on évaluera avec attention les garanties suivantes :
- Décès : la garantie de base, acceptée même quand la santé n’est pas parfaite.
- Perte totale et irréversible d’autonomie (PTIA) : souvent couplée à la garantie décès.
- Incapacité temporaire de travail (ITT) ou invalidité permanente partielle ou totale (IPP/IPT) : ces garanties peuvent faire l’objet d’exclusions ou de surprimes en cas d’antécédents médicaux, mais peuvent être adaptées sur mesure.
Il m’est souvent arrivé de conseiller une amie, professeure de langues en retraite anticipée, qui redoutait les démarches de crédit à cause de sa sclérose en plaques. En réalité, grâce à un contrat bien étudié, elle a pu faire l’acquisition d’un petit appartement dans les Landes, en s’assurant uniquement sur le décès et la PTIA. Une solution imparfaite, mais réaliste, et parfaitement accordée à ses moyens et à sa situation.
Faites jouer la concurrence, même après 60 ans
Autre avancée précieuse : la possibilité, rendue plus fluide par la loi Lemoine, de changer d’assurance à tout moment, sans pénalités ni frais. Cela vaut aussi pour nous, les retraités ou jeunes septuagénaires au regard vif, qui souhaitons renégocier une assurance parfois souscrite trop hâtivement ou à un tarif trop élevé.
Il est ainsi parfaitement possible de faire appel à un courtier spécialisé dans les risques médicaux, ou de comparer les offres d’assurances alternatives à celles proposées d’emblée par la banque. Ce n’est pas de la prétention : c’est de la lucidité financière ! Et souvenez-vous que les banques ne peuvent pas refuser votre contrat s’il présente des garanties équivalentes.
Quelques conseils pour naviguer plus sereinement
La mer est parfois agitée, mais le navire tient bon. Pour aborder un crédit immobilier en étant porteur d’une maladie ou d’un passé médical, quelques attitudes sont utiles :
- Préparer un dossier médical à jour, avec l’aide de son médecin traitant, pour faciliter l’analyse par l’assureur.
- Se faire accompagner par un courtier spécialisé ou une association d’aide aux emprunteurs si une difficulté survient.
- Ne jamais dissimuler une pathologie : en cas de fausse déclaration, l’assureur peut annuler votre contrat.
- Relire attentivement les exclusions de garantie, qui peuvent parfois faire toute la différence en cas de sinistre.
Et surtout, rappelez-vous ceci : le poids de la maladie n’empêche pas la réalisation des projets. L’assurance est là pour sécuriser, non pour freiner. Les textes évoluent, les assureurs aussi, et des solutions existent pour la plupart des cas. Rien ne sert de s’alarmer prématurément. Une tasse de thé ou un bon roman peut attendre, certes, mais une réévaluation de votre contrat d’assurance emprunteur ne doit pas attendre indéfiniment.
Avec un peu de détermination et les bonnes clés en main, il est tout à fait possible d’avancer en confiance sur le chemin de la propriété, même lorsque le chemin médical a été semé d’embûches. Après tout, qui mieux qu’un senior pour savoir que toute traversée mérite qu’on prenne le temps de hisser les voiles avec discernement ?
